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Présentation du cas

Une femme de 55 ans s’est présentée avec un essoufflement progressif à l’effort depuis une semaine. Ses antécédents médicaux étaient significatifs : un cancer du sein diagnostiqué sept ans plus tôt (traité par mastectomie et chimiothérapie), ainsi qu’une hypertension et une œsophagite par reflux. Les médicaments utilisés comprenaient le ramipril, la dompéridone et l’oméprazole.

A l’urgence, la température de la patiente était de 36,4°C, sa tension artérielle de 110/75 mmHg, sa fréquence cardiaque de 120 battements/min et sa fréquence respiratoire de 28 respirations/min, avec une saturation en oxygène de 90% à l’air ambiant. Le pouls veineux jugulaire était élevé à 8 cm au-dessus de l’angle sternal. Les bruits du cœur étaient faibles, mais il n’y avait pas de rythmes de galop, de frottements ou de murmures clairs. Les champs pulmonaires étaient clairs à l’auscultation, avec une matité à la percussion aux bases. Aucune lymphadénopathie n’a été palpée au niveau de la tête et du cou, des régions axillaires ou inguinales. L’examen abdominal n’a révélé aucune ascite, et aucune hypertrophie du foie ou de la rate. Il n’y avait aucun signe d’œdème périphérique.

L’analyse sanguine comprenait un hémogramme complet normal, des électrolytes, de l’urée, de la créatinine, un rapport international normalisé et un temps de thromboplastine partielle. La biochimie hépatique était anormale, avec des taux élevés d’aspartate aminotransférase 128 U/L, d’alanine aminotransférase 79 U/L, de gamma-glutamyl transférase 233 U/L, de phosphatase alcaline 130 U/L et de bilirubine conjuguée de 28 mmol/L. Alors qu’elle était encore au service des urgences, sa saturation en oxygène est tombée à 84 % malgré l’utilisation d’oxygène inspiré à 100 %. Un gaz du sang artériel réalisé peu après a révélé un pH de 7,39, une pression partielle (Pa) de CO2 de 35 mmHg, une PaO2 de 57 mmHg et un taux de bicarbonate de 20 mmol/L. Le gradient alvéolo-artériel d’oxygène était nettement anormal, à 612 mmHg.

Un électrocardiogramme a montré une tachycardie sinusale avec un aplatissement de l’onde T dans les dérivations V2 à V6, ainsi qu’un faible voltage QRS. Une radiographie pulmonaire a révélé un épanchement pleural bilatéral, une atélectasie bibasilaire et une silhouette cardiaque élargie (figure 1). Compte tenu de l’hypoxémie profonde, une tomodensitométrie a été réalisée pour exclure une embolie pulmonaire. Celle-ci a révélé un important épanchement péricardique, et une embolie pulmonaire sous-segmentaire impliquant le lobe supérieur gauche (figure 2).

Radiographie thoracique démontrant une cardiomégalie et un épanchement pleural bilatéral

Tomodensitométrie démontrant une embolie pulmonaire dans l’artère pulmonaire sous-segmentaire gauche (flèches)

Le patient a été admis en unité de soins intensifs. Une échocardiographie a été réalisée pour caractériser davantage l’épanchement vu à la tomodensitométrie. Celle-ci a révélé une tamponnade péricardique, avec un collapsus du ventricule droit (figure 3). La pression systolique du ventricule droit a été estimée à 30 mmHg, et la fonction systolique du ventricule droit semblait être préservée. Une péricardiocentèse à l’aiguille a permis de retirer 600 ml de liquide hémorragique, et un drain péricardique a été laissé en place. Une anticoagulation prudente avec de l’héparine intraveineuse a été commencée le jour suivant pour l’embolie pulmonaire.

Échocardiographie démontrant une tamponnade avec un collapsus du ventricule droit et de l’oreillette gauche (la flèche indique la compression du ventricule droit)

En soins intensifs, la pression artérielle du patient a chuté à 90/50 mmHg, nécessitant une augmentation avec de la dopamine intraveineuse. Son hypoxémie ne s’est pas résolue comme prévu, malgré le soulagement de la tamponnade et l’anticoagulation thérapeutique pour l’embole pulmonaire pendant trois jours. Sa PaO2 avec de l’oxygène inspiré à 65 % était de 65 mmHg. L’hypoxémie semblait disproportionnée par rapport à l’embole pulmonaire sous-segmentaire constaté, surtout en l’absence d’hypertension pulmonaire. Par conséquent, une échocardiographie transoesophagienne a été réalisée pour évaluer la présence d’un shunt intracardiaque. Celle-ci a révélé un flux bidirectionnel à travers un foramen ovale persistant (FOP) (figure 4), avec un shunt droite-gauche pendant la systole (associé à une hypokinésie globale sévère du ventricule droit). L’administration vigoureuse de liquides a permis l’arrêt de la dopamine par voie intraveineuse. En raison de l’hypoxémie persistante, le FOP a été fermé par voie percutanée à l’aide d’un dispositif de fermeture Amplatzer (AGA Medical, USA) (Figure 5). Son hypoxémie s’est résorbée, et elle a été sevrée avec succès jusqu’à la trachéotomie et la sortie de l’hôpital. Les échocardiographies de suivi réalisées un mois et trois mois plus tard ont montré une récupération de la fonction ventriculaire droite et aucun signe de shunt ou d’épanchement significatif récurrent. La cytologie du liquide péricardique a révélé des cellules d’adénocarcinome. On a demandé à l’oncologue de la patiente de réévaluer son cancer du sein à la lumière de ces résultats. Un traitement par warfarine pour un total de trois mois a été organisé, avec un suivi ambulatoire du rapport international normalisé.

Échocardiographie Doppler démontrant un shuntage de droite à gauche en systole (gauche) et de gauche à droite en diastole (droite). LA Atrium gauche ; RA Atrium droit

Déploiement du dispositif de fermeture Amplatzer (AGA Medical, USA) pour un foramen ovale patent

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