Le Comité de salut public de Danton

Désapprobation de la terreur

La position modérée de Danton s’accentue à l’automne 1793. Il n’intervient cependant pas personnellement mais laisse à ses amis le soin de critiquer la politique du gouvernement. Sa désapprobation de la répression terroriste était devenue si forte qu’il se retira de la vie politique, alléguant des raisons de santé ou de famille. Au sujet des Girondins, il aurait dit à un ami, début octobre 1793, « Je ne pourrai pas les sauver » et aurait éclaté en sanglots. Le 12 octobre, il obtient un congé de la Convention et part pour sa ville natale. Il en revient le 21 novembre, mais les raisons de son retour restent ambiguës.

Danton reprend aussitôt son activité politique. Il soutient vigoureusement le Comité de salut public contre les excès du mouvement antichrétien et s’oppose plus tard à la suppression des salaires des prêtres constitutionnels et donc à la séparation de l’Église et de l’État. Le soutien de Danton à la politique gouvernementale de stabilisation n’était sans doute pas sans arrière-pensées, tant personnelles que politiques ; il était déterminé à sauver des amis à lui qui avaient été arrêtés ou qui risquaient de l’être. Mais il voulait aussi freiner l’élan révolutionnaire du gouvernement. La politique dantoniste s’opposait en tous points au programme d’extrémisme populaire soutenu par Jacques Hébert et ses amis Cordeliers : la terreur extrême, la guerre à outrance.

Danton définit sa ligne politique modérée le 1er décembre 1793, lorsqu’il fait savoir aux radicaux de la Révolution que leur rôle est terminé. Dès lors, que telle ait été son intention ou non, il est considéré comme le chef de l’opposition modérée. Au début de l’année 1794, Danton et ses amis adoptent une attitude encore plus critique, le journaliste révolutionnaire Camille Desmoulins, du Vieux Cordelier, leur servant de porte-parole. Ils remettent en cause non seulement le système de la terreur de Robespierre, mais toute la politique du gouvernement révolutionnaire, tout en réveillant les espoirs des opposants au régime.

Lorsque le gouvernement comprend qu’il ne peut se laisser déborder par la droite, le vent tourne cependant brusquement. Lorsque Fabre d’Églantine, le dramaturge et zélé Révolutionnaire, compromis dans l’affaire de la Compagnie des Indes, est arrêté en janvier 1794, Danton tente de le défendre obliquement en exigeant que les députés arrêtés soient jugés devant le peuple. « Malheur à celui qui s’est assis à côté de Fabre et qui est encore sa dupe ! » s’écrie un député, menaçant manifestement Danton lui-même.

L’incident signale plus que la défaite de l’offensive des Indulgents, car, déjà compromis, ils sont eux-mêmes bientôt menacés par la contre-offensive de leurs adversaires, la faction d’ultra-gauche d’Hébert, les Exagérés, ou Enragés. Mais lorsque la crise s’aggrave et que l’opposition des Exagérés durcit sa position, le gouvernement perd patience : en mars 1794, Hébert et les principaux chefs des Cordeliers sont arrêtés. Condamnés à mort, ils sont exécutés le 24 mars. Les Indulgents, estimant que leur heure est venue, accentuent leur pression. Mais le gouvernement n’a pas l’intention de se laisser déborder par l’opposition modérée de la droite. Averti à plusieurs reprises des menaces qui pèsent sur lui, Danton reste imperturbable :  » Ils n’oseront pas !  » Finalement, dans la nuit du 29 au 30 mars 1794, lui et ses amis sont arrêtés.

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