Une chaise est posée à côté d’une photographie d’une chaise et d’une définition du mot chaise dans un dictionnaire. Peut-être que les trois sont des chaises, ou des codes pour une seule : un code visuel, un code verbal, et un code dans le langage des objets, c’est-à-dire une chaise en bois. Mais cette dernière chaise n’est-elle pas tout simplement… une chaise ? Ou, comme le demandait Marcel Duchamp dans sa Roue de bicyclette de 1913, l’inclusion d’un objet dans une œuvre d’art le change-t-elle en quelque sorte ? Si la photographie et les mots décrivent une chaise, en quoi leur fonctionnement est-il différent de celui de la vraie chaise, et que fait l’œuvre de Kosuth en additionnant ces fonctions ? Poussé à poser de telles questions, le spectateur s’engage dans les processus de base exigés par l’art conceptuel.
« L’art que j’appelle conceptuel est tel parce qu’il est basé sur une enquête sur la nature de l’art », a écrit Kosuth. « Ainsi, il s’agit… d’un travail, d’une réflexion sur toutes les implications de tous les aspects du concept d’art…. Cette idée de l’art repose sur la compréhension de la nature linguistique de toutes les propositions artistiques, qu’elles soient passées ou présentes, et quels que soient les éléments utilisés dans leur construction. » En poursuivant une chaise à travers trois registres différents, Kosuth nous demande d’essayer de déchiffrer les phrases subliminales dans lesquelles nous formulons notre expérience de l’art.
Extrait de publication de The Museum of Modern Art, MoMA Highlights, New York : The Museum of Modern Art, révisé en 2004, publié à l’origine en 1999, p. 257.